mardi 16 février 2016

Pour te mettre l'eau à la bouche...




Salut,

T'es chaud pour attaquer la lecture de mon blog?

Alors, en guise d'apéro, et si tu n'as pas encore lu mon bouquin, je te fais cadeau des premières lignes:

Avertissement :


Enfin, je pourrais appeler ça prologue, ou introduction, mais « avertissement », j’aime bien, même si ça me fait penser à « avertissement sans frais », façon huissier de justice, ce qui est un vilain métier, d’après moi ! Je pourrais remplacer ça par « prolégomènes », c’est un joli mot aussi ! Faisons, déjà, une courte pause pour savourer ce mot qu’est « prolégomènes », en faisant rouler les R…Non, tout compte fait ; c’est pédant : je préfère voir ma prose voisiner San Antonio que Kierkegaard, question de style !

Et puis, vu le format de la chose, ce bouquin est mieux près des livres de poche qu’entre deux pesant traités de philosophie germanique !

L’idée d’écrire m’est venue après deux conversations, avec deux de mes jeunes collègues, des gens de la génération actuelle, tellement pourris de talent que, parfois ça me dégoute.

L’un me disait, avec une modestie qui l’honore et qui est bien rare dans une profession où la plus grande partie des gens ont un ego surdéveloppé, qu’il avait eu la chance de débuter avec des pointures, des gens formés eux-mêmes par des tatoueurs de mon âge.

Quelle leçon de modestie, de la part de ce talentueux mouflet qui prononçait ces paroles en fignolant une infirmière « old-school » juste sous mon cœur !

Je dois bien reconnaitre que les tatoueurs qui sont encore, très provisoirement du bon côté de la cinquantaine, n’ont pas eu des « maîtres « qui étaient des cadors. Bien sûr, ils faisaient du travail correct, dans les années 70-80, mais ce n’est plus comparable avec aujourd’hui : encres, conditions d’hygiène… Tout a changé, et pour le mieux.

Les clients d’aujourd’hui n’imaginent pas, par exemple, les conditions d’hygiène des tatoueurs si l’on ne remonte que vingt ans dans un proche passé.

Et si le mec qui m’a formé avait eu le dixième du talent du jeune crétin qui me disait ça, il aurait figuré dans le Top 10 Européen, de son époque, bien sûr !

L’autre, une jeune Lady, jolie tatoueuse tout aussi pourrie de talent et par surcroit dotée d’un caractère de pitt-Bull et d’une efficacité professionnelle de chasseur-bombardier F18, regrettait (il faut croire que quelques clients du genre « fashion-victim » lui avait tapé sur les nerfs, nerfs qu’elle a sensible) la douce époque du tatouage « underground » , époque où cet art de la rue était réservé aux marins en escale, aux légionnaires en permission et aux Rockeurs, qui, eux(à l’en croire), ne faisait pas chier le tatoueur en ayant des vapeurs de vierge ! Sur ce coup, je me marrais un bon coup, parce que aussi talentueuse que soit la demoiselle, il lui manquait pas loin de quinze piges au compteur pour savoir de quoi elle parlait.

C’est alors que je me suis rendu compte que, sans être dans les ancêtres de la profession, j’avais eu la chance de voir la fin de ces années-là, celles où les tatoueurs, n’étant pas encore des artistes (enfin, pour la plupart), et sans appartenir à la voyoucratie, naviguaient à vue entre les berges des deux mondes : Ils étaient des marginaux, au sens premier et non-péjoratif du mot, ils vivaient simplement autrement.

Entendons-nous bien, je n’ai pas la prétention de donner dans l’étude sociologique (c’est toujours un peu barbant à lire, ces machins-là), ou de raconter l’Histoire, avec un H majuscule, du tatouage, avec son évolution (bien réelle), et tutti quanti. Ma seule prétention est de narrer un parcours, le mien. Pour faire avancer les choses, un grand coup de pied dans la fourmilière, c’est pas si mal ! Il ne faut donc pas chercher ici ce qui ne s’y trouve pas : pas de conseils éclairés aux jeunes (quoique…), de leçons de philosophie. En plus, quand on y songe, entre le coup de gueule et le cri d’amour, il n’y a qu’une fine nuance.

J’ai vu le tatouage sortir de la rue, gagner les bras des bourgeois, des gamins qui sortent en boite. J’ai vu les hirondelles « old-school » quitter les plis de l’aine des « Skinhead-girls » pour atterrir sur l’avant-bras des étudiantes en droit.

J’étais là.

Ceci n’est que mon histoire de tatoueur. La différence entre un conte de fée et une histoire de tatoueur, c’est que le conte de fée commence par « il était une fois… ». Alors que l’histoire de tatoueur commence par « alors écoute, c’est pas des conneries, mais j’te jure que… ». Tout est vrai dans ce qui suit.

Ceux qui me connaissent le savent, je n’ai pas ma langue dans ma poche, aussi, dans les pages qui suivent, j’ai bien l’intention de taper sur tout ce qui bouge, tout le monde va en prendre pour son grade : les tatoueurs et les tatoués, les mecs et les nanas, les vendeuses, les apprentis, les organisateurs de convention, toute le monde ! Le sens de l’humour, c’est particulier ; tout le monde affirme l’avoir. Jusqu’au moment où un grand chacal dans mon genre te taille un costard. Là, tu fais ton effarouché, pas vrai ? En fait, les vrais blaireaux, les blaireaux intégraux, se comportent comme des blaireaux 24 heures sur 24 ! Mais nous, les gens normaux, on n’est pas des blaireaux, d’accord ?

On est les éléments sains de la société, les anticorps à la bêtise ambiante. Mais il nous arrive de nous comporter comme des cons, des vrais !

Quel est le mec qui peut affirmer, sans rire « je me suis toujours conduit en type bien et réglo » ?

Quelle est la fille qui peut se regarder dans une glace et dire « je ne me suis jamais comportée comme une garce » ?

Par conséquent, j’ai bien l’intention d’envoyer tous azimuts, et tant pis si ça grince des dents du côté du lectorat. Si ça t’inquiète, arrête cette lecture (pourtant édifiante), revend ce bouquin sur E-Bay.

Avec le bénéfice de cette vente, achète donc un bouquin de Paolo Coelho : cet homme dit de belles choses sur la vie, l’amour et l’amitié entre les hommes. Tu en auras grand profit sur les réseaux sociaux, ou de telles phrases font leurs petits effets, illustrés par une photo de petit chat, de petit chien ou, à la rigueur, de petit pangolin.

Dans le cas contraire, t’es prévenu, tu vas en prendre plein la truffe !

T’es encore là ?

Okay, embarque alors, le navire n’est pas prêt de jeter l’encre...

Avant d’envoyer la sauce, encore un point. Chaque fois que je me suis fait tatouer, j’ai appris quelque chose, parfois à la dure, sentant dans ma peau le travail de chaque aiguille. Aussi, je voudrais avant tout, remercier tous ceux qui m’ont tatoué, c’est-à-dire, Marc, Jeff, « light » Phil, Patrick, Bruno Kea, « Cool-Hand » Luc, Tin-Tin, Neusky, Carlito, Shad, Fafnir, Eveline, Paul, Mike-the Canman, Jean-Paul, Phil Kyle, Ben, Emilie « la Perla » et Marcin .

Et, surtout, mes clients, tous !


C’est tout (pour le moment)