samedi 7 janvier 2017

Du neo-tribalisme à deux balles au grand n'importe quoi




J'ai l'air de mauvais poil sur cette photo? Hé ben oui, mes loulous : y en a marre, marre des escrocs du tatouage, des bouffons new-age qui font de la merde en jouant les primitifs!

Comme si les gribouilleurs habituels ne suffisaient pas, il faut maintenant se farcir les neo-babas, les hippies nostalgiques du bon sauvage qui ont tout pigé à tout, et les déçus du bouddhisme infoutus de faire pousser du fromage de chèvre dans le Larzac...

Outre les maitres japonais de la technique "tebori" et les quelques tatoueurs qui, principalement en Asie et dans le Pacifique, ont su préserver ou retrouver les gestes traditionnels de leurs ancêtres, on trouve, surtout en Europe et aux Etats-Unis, un nombre sans cesse croissant de tatoueurs s'intéressants aux anciennes techniques. Parmi eux, un très petit nombre d’artistes sincères et honnêtes qui se sont astreints à l’apprentissage long et ardus du tatouage manuel. Et une très large majorité de guignols.

Ces charlots, après l’échec retentissant des leurs autres tentatives professionnelles, trouvent dans le tatouage "traditionnel" l’espoir d’une réussite qui leur a été jusque-là refusée. Trouvant dans la pique manuelle la légitimation de l’imprécision de leurs lignes baveuses et des leurs dessins approximatifs, ils se justifient gauchement par un soi-disant "retour aux sources", par un discours farci de calembredaines plus ou moins "new-age", de références boiteuses à un shamanisme Viking ou Dayak de mauvais aloi. 

Il ne faut pas s’y tromper : sous le couvert de "mieux respecter la peau" (quelle blague) ou de "revenir aux sources de la pratique" (de quoi, du grand n’importe quoi ?), ces gribouilleurs justifient surtout le manque d’ardeur au travail qui les empêche de développer un talent, si talent il y a. J’en ai même croisé l’un ou l’autre qui en profitaient pour s’assoir avec allégresse sur certaines règles d’hygiène pourtant élémentaires, m’expliquant gravement que "eux, ils sont des exceptions, parce qu’ils travaillent différemment" (sic).

Pour la clarté de ma démonstration, je vais ici oser une comparaison qui sera, je l'espère, limpide et point trop audacieuse :

Mon excellent ami David est instructeur de survie (et néanmoins sympathique, si si ). Son métier consiste à apprendre à ses clients à vivre dans la nature, à "faire plus avec moins". Elevé dans le nord du Canada, passant une grande partie de sa vie dans les bois, il est devenu un véritable artiste dans toute une série de techniques primitives, parmi lesquelles l’art de faire du feu, y compris à l’aide de silex ou en faisant tourner une drille dans une pièce de bois à l’aide d’un arc (je te le promets, ce n’est pas si facile). Toutefois, même s’il domine la technique ancestrale, si une situation d’urgence se présentait, si faire un feu rapidement et efficacement était une question de vie ou de mort, même lui, que ses stagiaires surnomment pourtant affectueusement "Manitou", n’hésiterait pas une seconde à recourir à tous les moyens que lui offre le monde moderne, depuis le briquet à gaz jusqu’au bidon de napalm.

Sur la peau, en fait, c’est un peu pareil : on ne joue pas, on ne s’entraine pas, on ne se réfugie pas dans un fatras de couillonnades pseudo-primitives : on réalise le meilleur tatouage possible, en usant de toutes les ressources possibles, pour offrir à son client un produit propre et de qualité.

Le reste n’est que verbiage inutile.